À Marseille, même issus de familles modestes, les étudiants ont accès à une prépa gratuite de médecine. Seule condition exigée : une motivation à toute épreuve.

Pour se préparer au difficile concours de première année de médecine, beaucoup d’étudiants suivent une « prépa ». On les appelle « écuries » dans le jargon marseillais. Des organismes privés payants dont les tarifs s’échelonnent de 1 000 € à 10 000 € l’année. De trop grosses sommes pour nombre d’aspirants à l’examen. « Ceux qui viennent de quartiers populaires et modestes ne peuvent pas s’y inscrire. Cela contrarie, voire empêche leur projet et ils se tournent vers une autre voie », expose Aïssa Grabsi.

Un accompagnement par des étudiants qui ont réussi le concours

Engagé dans la lutte contre les inégalités et les discriminations à travers son association Le sel de la vie, Aïssa Grabsi, enseignant, décide de créer une écurie gratuite en 2020. Nom de code : Medenpharmakiné, en référence aux métiers accessibles par le concours.
Dans une volonté de mixité sociale, cette classe prépa est ouverte à tous, étudiants de milieux modestes ou non. Aucune condition n’est imposée, si ce n’est une volonté de fer. Concrètement, des tuteurs, étudiants ayant déjà réussi le concours, accompagnent les premières années dans leur travail. Ils sont 12 pour 36 inscrits cette année 2021-2022. « Cela crée une vraie proximité contrairement aux écuries payantes où chaque tuteur suit 40 personnes », confie Farès. Aujourd’hui tuteur, il a suivi la prépa gratuite l’année dernière tout en étant inscrit à une écurie à 3 500 € l’année. « La méthode de travail est identique. La grande différence est que l’on dispose d’un accompagnement sur le plan personnel avec Medenpharmakiné », souligne le jeune homme.

Travail et détente au menu

Des séances collectives hebdomadaires sont proposées aux étudiants pour s’entraîner dans les conditions réelles du concours. Ils planchent ainsi sur des examens blancs pour chaque unité d’enseignement, dans les mêmes contraintes de temps que lors des partiels. En parallèle, chacun travaille de son côté et peut demander de l’aide à son tuteur. Surtout, un psychiatre, une sophrologue et un art-thérapeute sont à leur disposition, gratuitement là aussi. « Les étudiants en première année sont dans un parcours intense. Ces séances ont pour but d’oxygéner leur cerveau, de leur libérer de l’espace mental », souligne Aïssa Grabsi. Cocktail gagnant.

La clé pour réussir : le travail, pas l’argent

Les résultats de la première promotion – baptisée Arc-en-ciel – ont montré les vertus de la méthode Medenpharmakiné. Sur les 12 étudiants, 3 sont passés en deuxième année. Un taux de réussite de 25%, supérieur à certaines écuries payantes. Preuve que l’argent ne conditionne pas l’obtention du concours ! En attendant de voir si ces résultats seront confirmés par la trentaine d’étudiants de la deuxième promo en cours, nommée Axel Kahn. « On peut aussi réussir sans prépa, mais c’est plus facile avec », rappelle Aïssata, actuelle bénéficiaire. Un avis illustré par le parcours d’Hichma, qui a validé l’examen en 2021 en étant seulement inscrite au TAM (tutorat associatif marseillais), une association dans la veine de Medenpharmakiné. « Je culpabilisais à l’idée de faire dépenser beaucoup d’argent à mes parents pour une écurie payante alors que j’allais peut-être échouer », confie-t-elle. Désormais tutrice au sein de la prépa gratuite car elle « aime transmettre ses connaissances », la jeune femme veut montrer « qu’on peut réussir sans miser une grosse somme d’argent ». Un message en guise de revendication.

Une centaine de places pour 2022

La prochaine promotion de Medenpharmakiné, qui démarrera en septembre 2022, pourra accueillir une centaine d’étudiants. L’AP-HM (assistance publique – hôpitaux de Marseille) leur met à disposition des salles de cours et un amphithéâtre au sein de l’hôpital de la Timone. Ils peuvent même déjeuner gratuitement au restaurant solidaire Le République grâce à une convention passée avec Le sel de la vie.
Les aspirants aux études de médecine intéressés n’ont qu’à contacter l’association via les réseaux sociaux pour candidater. S’ils sont acceptés, ils devront seulement payer 10 € de participation aux frais de gestion administrative et comptable pour l’ensemble de l’année. À la clé, la promesse d’une aide précieuse dans leur parcours.

Agathe Perrier

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